Une bien jolie lecture pour un joli titre et une belle couverture !
Angélique Villeneuve signe un roman gracieux sur un sujet lourd : l'absence, le manque et les gueules cassées de la 1ère guerre mondiale.
Jeune couple d'ouvriers, Jeanne et Toussaint sont séparés par la mobilisation générale. La déclaration de guerre signe la nécessité, pour les hommes, de partir combattre, de manifester leur héroïsme. Pendant ce temps, à l'arrière, les femmes mènent vaille que vaille leur vie. Le froid, la pénurie, l'absence, les lettres qui ne disent rien et qui disent tout, la solitude.... Jeanne, soutenue par ses voisines, élève Léonie (alias Léo) et continue son travail de fleuriste à domicile. dans le froid de l'hiver et dans leur gourbis, elle fait naître de ses doigts de fée des fleurs toutes plus somptueuses et colorées les unes que les autres. De temps à autre, une lettre transmet des pensées, des baisers, des nouvelles... tout ce qui peut survivre à la censure. Peu habitués des mots, ces deux amoureux ne se livrent pas moins des mots touchants.
Fin 1916, Toussaint est gravement blessé et est transféré de Verdun au Val de Grâce où l'on tente tant bien que mal de réparer les blessures, les horreurs de la guerre. Il est devenu une gueule cassée et il y a beaucoup à réparer ! Il y reste deux ans.
Le roman débute quelques jours avant l'armistice, le soir de son retour. Le parcours de Toussaint, nous allons l'apprendre par bribes au gré des souvenirs de Jeanne, de l'évocation de tous ces jours sans lui. Et surtout, nous allons suivre le retour de celui qui, tant attendu, se révèle, finalement, pas toujours si facile à accueillir. Où est passé le Toussaint d'avant ? ce jeune homme fringant et énergique ? C'est comme si la guerre l'avait aspiré, avait amenuisé son corps, ses forces.....Sans parler de la partie inférieure de son visage qu'il dissimule derrière un bandeau. Commence alors un véritable combat pour que chacun retrouve ses marques dans l'appartement exigu, pour renouer les liens distendus par l'absence et la blessure, pour que Toussaint revienne chez les vivants. Jeanne est une jeune femme forte et bien décidée à faire face à cette nouvelle situation même si, bien sûr, elle connaît des moments de découragement. Ce que les mots que Toussaint ne peut plus prononcer, ses yeux finiront par le dire, la distance, que les mots ne peuvent combler, le sera par les corps et le désir.
Un très beau roman qui rend hommage à la force de caractère de ces hommes et de ces femmes décimés par la guerre - boucherie héroïque qui se transformera en véritable abattoir. Une écriture simple et poétique qui nous enchante et nous transporte dans un monde rude mais véritablement humain.
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