"Il faut cultiver notre jardin"

lundi 23 juillet 2018

Marcher à Kerguelen

Un nouveau titre découvert grâce à une pochette surprise ! François Garde nous livre son journal de bord d'une expédition qui, durant 25 jours, l'a conduit, avec ses trois compagnons, du Nord au Sud de Kerguelen. Bravant le vent, le vent et toujours le vent, mais aussi la pluie, la neige et un terrain bien difficile, ils ont testé leur résistance, leurs limites dans des paysages juste sublimes. Surveillance de tous les instants, attention aigüe à la météo, au terrain, aux autres, armés de sacs à dos juste remplis comme il faut (tout est pesé), ils ont mené à bien un projet qui tenait à cœur à l'auteur et qui avait été préparé de longs mois en amont. Mika guide d'expédition, retrouvé au Groenland en 2007, Bertrand, ancien officier de marine photographe, Fred médecin et l'auteur.
, tous sont des montagnards chevronnés, des marcheurs aguerris. Ces quatre hommes ont traversé des rivières, des ressacs, marché le long de plages, gravi des sommets, traversé des déserts.... tant est grande la diversité du lieu traversé dans leur itinérance. Ce genre d'aventure confronte chacun à la Nature mais aussi à soi-même et permet de prendre conscience de ce qui est essentiel (quelques pages sur le silence, sur le poids des mots, sur l'apparence, d'autres sur la musique qu'il se joue dans sa tête - dont une symphonie qu'il gardera associée à ces paysages) mais aussi de la beauté indicible de la nature encore quasi vierge de toute trace humaine (ou en tous les cas préservée de sa bêtise et de sa propension à tout abîmer). 
 « L'île nous ignore, et n'a que faire de nous. Elle est. Nous passons.
Je ne cherche en rien à triompher d'elle. Je m'éprouve à son rugueux contact, je rends hommage à sa pesante réalité. Dans la froidure et la pluie, à l'intersection des océans les plus rudes de la planète, Kerguelen reste étrangère aux ambitions des hommes, et aux miennes. »


Ce journal de bord, mis en forme au retour,  est d'une facture simple, sans grandiloquence. L'auteur égrène les noms des cabanes (remplies de vivres et havres de paix car procurant un abri contre le vent), mais aussi ceux des sommets, des plaines (dont la toponymie s'inspire soit des découvreurs et explorateurs ayant ouvert la voie soit de notre géographie continentale - baie d'Audierne, Golfe du Morbihan) et évoque la faune qu'ils croisent (bonbons, rennes, manchots, sternes...). 
C'est bien écrit, jamais redondant, plein d'humilité et de simplicité face à la vie mais aussi face à l'écriture. Ou comment les mots ne réussiront jamais complètement à rendre compte du côté exceptionnel de l'aventure "De l'expérience entière telle que je l'ai vécue, ils ne sauront rien et ne pourront rien savoir. Le récit, oral ou écrit, ne peut prétendre représenter une réalité. Il en donne seulement un aperçu, lointain, insincère, troublé, gauchi, qui se donne les oripeaux de la vérité. Ce qui s'est passé pendant ces vingt-cinq jours est insusceptible de transmission. L'alambic du souvenir est un leurre. Dès demain, quoi que je fasse, je commencerai d'être infidèle à notre traversée."
A lire !
 Et pour avoir un aperçu de l'expédition, suivez le lien : http://latitudes-nord.fr/carnets-et-photos/trekker-traversee-de-l-ile-de-kerguelen 

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