"Il faut cultiver notre jardin"

vendredi 10 avril 2020

Le perroquet

Comment faire, à 8 ans, pour comprendre une maman malade, en proie à des crises impressionnantes qui la laissent exsangue et lui valent des séjours à l'hôpital, où elle part enveloppée dans une camisole de force ? Pas simple déjà pour les adultes alors pour Bastien, c'est compliqué. 
Une maman toujours fatiguée, apathique, sans âge, sans dents de devant (chute dans un escalier ?), est-ce encore une maman ? Ou est-ce un super-héros aux super-pouvoirs comme Jean Grey des X-Men puisqu'elle peut exploser à tout moment ? ou plutôt  un funambule, qui avance sur un fil comme la dame du cirque. Et puis ces séjours dans des établissements spécialisés, ils doivent lui rapporter plein de points de fidélité, non ?


Certes le regard de l'enfance et l’imagination aident Bastien à mettre de la distance mais quand même il n'aime pas quand sa maman revient sans réaction, sans sentiment, sans grande envie. Elle lui manque.... « Je sais que c'est difficile pour toi quand je suis malade et que je dois partir me faire soigner. Je sais que je te manque. Mais je t'assure que tu me manques aussi. Alors quand je ne suis pas là, promets-moi de ne penser qu'aux bons moments que nous avons déjà passés ensemble. D'accord ? »
Heureusement ses grands-parents sont là, toujours prêts à prendre le relais pour l'éloigner, pour l'entourer. Heureusement son père a compris que ces "troubles bipolaires à tendance schizophrénique" nécessitent un traitement lourd et beaucoup d'amour. Tant bien que mal, il fait donc tout pour accompagner sa famille, pour lui dispenser tout l'amour nécessaire. 
D'anecdotes en anecdotes racontées sur 5-6 pages nous permet de construire un portrait kaléidoscopique de cette famille et de la maladie - joli moyen d'apprivoiser le maelström d'émotions liées à la dépression, qu'il s'agisse de l'incompréhension et de la douleur des proches mais aussi de la culpabilité du malade.
Une BD bouleversante qui nous rappelle ce qu'est la dépression, qui nous montre grâce à son graphisme et aux couleurs expressives les alternances entre les moments de crise et les moments de répit. Monstres, noyade, feu... autant d'images symboliques pour donner à voir ce qui s'empare de Marie. 
Quant au perroquet qui donne son titre à l'ouvrage, peluche informe et rudimentaire, il est tellement chargé d'amour que tout le monde souhaiterait en posséder un !
L'auteur Espé se livre et revient avec émotion mais sans pathos sur une partie de sa vie : c'est fort, c'est vrai, c'est beau.


 

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